Allemagne

Lettre ouverte de la ville de Königs Wusterhausen adressée au gouvernement fédéral allemand

rédigée par le Conseil municipal de la ville de Königs Wusterhausen

Monsieur le Chancelier Scholz,
Mesdames les Ministres,
Messieurs les Ministres,

En tant qu'organe de l'autonomie communale, nous accordons toute notre attention au cadre de vie de nos citoyens et citoyennes, à la mise à disposition des infrastructures sociales, économiques et culturelles.

Les défis de ces dernières années, que ce soit à la suite de la crise des réfugiés ou de la politique de pandémie, ont déjà mis à plusieurs reprises les capacités humaines et financières des communes à rude épreuve.

Au lieu de pouvoir nous consacrer aux nombreuses tâches essentielles urgentes, la prochaine crise se profile à l'horizon.

La guerre d'agression de la Russie contre l'Ukraine a déclenché presque immédiatement une spirale d'escalade qui s'accélère et menace de se transformer en une crise globale.

Contrairement à tous les autres conflits, le gouvernement allemand n'a fait aucun effort de diplomatie perceptible. Seules les armes et des mesures de sanctions totalement débridées doivent être cette fois-ci le seul moyen possible. Cela s'accompagne d'un réarmement militaire forcé.

Nous n'avons pas la prétention de savoir quels sont les moyens appropriés dans cette situation politique. Mais ce que nous savons avec certitude, c'est que l'Allemagne ne dispose pas des ressources minières, des matières premières et des choix énergétiques lui permettant de maintenir son économie et le niveau de bien-être minimal de sa population indépendamment des autres pays du monde. Les pays dont nous dépendons ont généralement leur propre «système de valeurs» opposé au nôtre, souvent ils mènent depuis des années des guerres contre leur propre peuple ou contre d'autres.

Voulons-nous donc être en état de guerre avec tous ces pays à l'avenir?

Nous considérons ce type d'évolution avec une horreur sidérante, surtout au vu des conséquences déjà prévisibles.

Une politique qui s'obstine à croire qu'il ne peut y avoir qu'une solution militaire à ce conflit accepte à bon compte la mort et la destruction – surtout pour des dizaines de milliers de personnes non impliquées et innocentes.

Outre les conséquences directes de la guerre en Ukraine, la guerre des sanctions a également des répercussions sur des personnes qui n'y sont pas du tout impliquées, les habitants de ce que l'on appelle le Sud global. En raison de la jungle des sanctions, d'énormes quantités d'engrais et de céréales ont été bloquées en provenance de Russie et de Biélorussie. Hormis les exportations de céréales ukrainiennes, le problème persiste. Une extension des famines dans de nombreux pays déjà meurtris en est la conséquence. Cela va-t-il réellement dans le sens d'une politique «guidée par les valeurs»?

Les conséquences de la politique de sanctions à l'encontre de la Russie se répercutent également sur nous. Les prix de l'énergie et des denrées alimentaires augmentent de plus en plus rapidement, la hausse historique des prix à la production de 45,8% en août indique que l'inflation de 10% prévue pour septembre ne sera qu'une étape intermédiaire sur la voie de nouveaux records.

En juillet déjà, l'Association des caisses d'épargne et des banques de virement annonçait qu'en cas de pérennisation de l'inflation, 60% des ménages allemands ne pourraient plus constituer de réserves, la croissance des dépôts ayant chuté de 98% par rapport à 2020. A cette date, l'inflation était de 7,9%.

Les mesures de stabilisation d'un montant de 200 milliards d'euros, annoncées avec fracas, ne résolvent pas le problème de fond, on s'attaque aux symptômes là où une réflexion critique sur les mesures prises et un changement de cap seraient nécessaires.

Les annonces de fermetures définitives d'entreprises et de faillites se multiplient. De nombreux commerçants déjà ébranlés par la politique de pandémie manquent définitivement d'air, en raison de coûts élevés et d'un chiffre d'affaires en chute libre.

Des pertes non quantifiables nous attendent en raison des fermetures d'entreprises, des délocalisations de la production à l'étranger, de la récession et de la réticence à acheter. Des secteurs entiers disparaîtront et l'Allemagne perdra ses derniers avantages en tant que site d'implantation. L'inflation croissante entraînera une fuite massive des capitaux et le système financier, déjà fragilisé, risque de s'effondrer. L'ampleur des dommages globaux est incalculable. Le chômage explosera, le nombre de réfugiés augmentera en même temps, les systèmes sociaux sont déjà complètement surchargés. Les troubles sociaux et politiques qui en découleront sont inévitables.

Toutes ces évolutions sont prévisibles, sans que cela n'aide les habitants de l'Ukraine.

Nous vous appelons donc à vous abstenir de tout ce qui pourrait prolonger cette guerre et à tout faire pour que les armes se taisent. Aussi bien dans la guerre des armes que dans la guerre économique!

Nous aimerions conclure par les mots de Willy Brandt, qui n'ont rien perdu de leur validité: «La paix n'est pas tout, mais tout n'est rien sans la paix.»

Source: https://www.koenigs-wusterhausen.de/1024101/Offener-Brief-der-SVV-vom-20_10_2022-Usch-1.pdf, 20 octobre 2022

(Traduction «Point de vue Suisse»)

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