Parvenir à une paix juste et durable en Ukraine

Déclaration des participants au «Groupe d'étude sur la science et l'éthique» sous les auspices du «Réseau de solutions pour le développement durable de l’ONU» (UN-SDSN)

(4 juillet 2022) (Rédaction CH-S.) La déclaration du «Groupe d'étude sur la science et l'éthique» pour les négociations de paix en Ukraine, telle que documentée ci-dessous, montre clairement que les possibilités de négociations de paix sérieuses ont toujours existé et existent encore aujourd'hui. Cependant, une condition préalable est une véritable volonté de paix, comme on peut le constater dans la proposition.

Jusqu'à présent, les efforts pour parvenir à la paix en Ukraine ont échoué principalement en raison de la mauvaise volonté de cercles influents aux Etats-Unis et au Royaume-Uni, qui poursuivent leurs propres objectifs. A ce jour, ils sabotent tous les efforts et de nouveaux obstacles sont constamment dressés (actuellement: accord du Congrès américain à livrer pour plus de 60 milliards de dollars des armes de pointe à l'Ukraine, escalade délibérée de la situation autour de Kaliningrad, nouvelles exigences constantes de Zelensky, etc.)

Cette déclaration est courageuse et portée par un esprit honnête et humain. Nous en recommandons volontiers la lecture.

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Le «Réseau de solutions pour le développement durable» (UN-SDSN) a été lancé en 2012 par le Secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, afin de mobiliser l'expertise scientifique et technologique mondiale pour promouvoir la résolution de problèmes pratiques pour le développement durable et mettre en œuvre les «Objectifs de développement durable» (ODD). Après leur adoption, le SDSN s'engage désormais à soutenir la mise en œuvre des ODD aux niveaux national et international. (http://unsdsn.org)
Cette déclaration n'engage que les participants individuels du «Groupe d'étude sur la science et l'éthique» sous les auspices du «Réseau de solutions pour le développement durable des Nations Unies», et non pas une autre organisation, y compris le Saint-Siège, les Nations Unies ou un gouvernement national. (Voir la liste des signataires à la fin du texte).
Cette déclaration a été adoptée par le «groupe d’étude» à la Casina Pio IV, Cité du Vatican, les 6 et 7 juin 2022.

Jésus a enseigné au monde que les artisans de la paix sont bénis, car ils sont les enfants de Dieu. Alors que la guerre fait rage en Ukraine, le monde a besoin d'artisans de la paix pour aider les belligérants à choisir la paix plutôt que la poursuite du conflit. Les Etats-Unis, l'Union européenne, la Turquie, la Chine et d'autres pays doivent aider les deux parties à se sentir en sécurité dans un accord de paix négocié.

Pour l'Ukraine, la sécurité signifie qu'un accord de paix ne sera pas suivi de nouvelles menaces ou incursions russes. Pour la Russie, la sécurité signifie que le retrait de l'Ukraine ne sera pas suivi d'une expansion vers l'est de l'OTAN et d'un armement lourd en Ukraine. La paix, en bref, signifie une Ukraine neutre, sûre de sa souveraineté, de son indépendance et de son intégrité territoriale.

Le pape François a formulé son appel à la paix en termes clairs et forts:

«Je renouvelle mon appel à ceux qui gouvernent les nations: ne conduisez pas l'humanité à la ruine. Je vous en prie! Ne conduisez pas l'humanité à la ruine!»

Sa Toute Sainteté le Patriarche Bartholomée a déclaré:

«Nous appelons toutes les parties concernées à poursuivre sur cette voie du dialogue et du respect du droit international, afin de mettre un terme au conflit et de permettre à tous les Ukrainiens de vivre en harmonie. Les armes ne sont pas la solution.»

Parvenir à une paix juste

L'objectif du rétablissement de la paix en Ukraine n'est pas seulement une paix négative – c'est-à-dire une paix sans justice – mais une paix positive, fondée fermement sur les quatre piliers des relations morales entre les Etats reconnus par Saint Jean XXIII dans son magistère «Pacem in Terris»: la vérité, la justice, la coopération volontaire et la liberté (paragraphe 80). De telles relations morales sont nécessaires non seulement entre la Russie et l'Ukraine, mais aussi entre la Russie, les Etats-Unis et l'Union européenne.

L'invasion de l'Ukraine par la Russie constitue sans aucun doute une violation flagrante de la Charte des Nations Unies et du droit international. Les différends entre la Russie et l'Ukraine auraient certainement dû être résolus par des négociations soutenues par le Conseil de sécurité des Nations Unies, dans le respect des intérêts de sécurité de tous les pays. Aujourd'hui, les sombres réalités des opérations de guerre en cours, aucun des deux camps n'étant susceptible de remporter une victoire militaire décisive, devraient pousser les deux parties à la table des négociations dès que possible afin d'éviter la prolongation de la guerre et de parvenir à une paix juste.

Une paix négociée au lieu d'un conflit gelé

La guerre en Ukraine est susceptible d'évoluer en une guerre d'usure et de se terminer soit par un conflit gelé, soit par une paix négociée, plutôt que par la victoire absolue d'un camp sur l'autre. Une paix négociée serait une meilleure issue que les sacrifices d'une guerre d'usure et d'un conflit gelé, tant pour les peuples et les gouvernements d'Ukraine, de Russie, des Etats-Unis et de l'UE que pour le reste du monde.

Si la guerre se termine par un conflit gelé, la Russie continuera d'occuper une partie importante de l'est et du sud de l'Ukraine, tandis que les sanctions occidentales contre la Russie resteront en place. Le commerce et les investissements entre la Russie et l'Occident resteraient bloqués, ce qui entraînerait une contraction générale du commerce et du développement dans le monde. Des armes et du personnel militaire continueraient également à affluer en Ukraine depuis des sources extérieures.

Si, au contraire, la guerre se termine par une paix négociée, de nouvelles pertes importantes parmi la population civile ukrainienne et les militaires des deux camps seraient évitées et l'existence et l'indépendance de l'Etat ukrainien pourraient être garanties contre les tentatives extérieures de le renverser. La plupart des régions actuellement occupées par la Russie reviendraient à la souveraineté ukrainienne, certaines régions pourraient être soumises à des réglementations spéciales, l'armée russe serait retirée et les sanctions occidentales seraient levées, ce qui permettrait la reconstruction et la mise en place d'un niveau de sécurité plus élevé pour tous les acteurs de la société ukrainienne et des pays voisins.

Les conditions de base d'un éventuel accord de paix ont été esquissées dans la deuxième partie du mois de mars, lorsque les négociations entre les deux parties semblaient bien progresser, et plus récemment dans la proposition de l'Italie d'un plan de paix en quatre parties, fin mai. Lors des négociations de la deuxième quinzaine de mars, l'Ukraine a suggéré quatre points pour un règlement de paix: la neutralité; des garanties internationales de sécurité pour l'Ukraine; une période prolongée pour déterminer de manière concluante le statut de la Crimée; et des négociations sur «les questions complexes du Donbass».

Le plan de paix de l'Italie comporte également quatre points: un cessez-le-feu; la neutralité de l'Ukraine; des négociations constantes sur la Crimée et le Donbass; et des négociations multilatérales au sein de l'OSCE et entre la Russie et l'OTAN sur les accords de sécurité régionaux.

Points clés pour un cessez-le-feu et un accord de paix positif

Tout en nous en remettant à la sagesse pratique (phronesis) des artisans de la paix bénis, sur la base des racines identifiables du conflit, des négociations de mars et des initiatives de paix à ce jour, nous suggérons les points de repère suivants pour un cessez-le-feu et un accord de paix positif:

1) Neutralité de l'Ukraine, c'est-à-dire renoncer à l'ambition nationale d'adhérer à l'OTAN tout en reconnaissant la liberté de l'Ukraine de conclure des accords avec l'Union européenne et d'autres;

2) Garanties de sécurité pour la souveraineté, l'indépendance et l'intégrité territoriale de l'Ukraine fournies par les membres du P-5 des Nations Unies (Chine, France, Russie, Royaume-Uni et Etats-Unis) plus l'Union européenne et la Turquie, qui pourraient inclure la transparence militaire et des restrictions sur le stationnement militaire et les exercices à grande échelle dans les zones frontalières sous observation internationale liées à la levée des sanctions économiques;

3) Contrôle de facto de la Crimée par la Russie pendant quelques années, après quoi les parties chercheraient par la diplomatie un règlement permanent de jure, qui pourrait inclure un accès facilité des communautés locales à l'Ukraine et à la Russie, des politiques libérales de franchissement des frontières pour les personnes et le commerce, le stationnement de la flotte russe de la mer Noire et des compensations financières;

4) Autonomie des régions de Lougansk et de Donetsk au sein de l'Ukraine, qui pourrait inclure des aspects économiques, politiques et culturels, à préciser dans un bref délai;

5) L'accès commercial garanti de l'Ukraine et de la Russie aux ports de la mer Noire des deux pays;

6) La suppression progressive des sanctions occidentales à l'encontre de la Russie, parallèlement au retrait de l'armée russe, conformément à l'accord;

7) Un fonds multilatéral pour la reconstruction et le développement des régions ukrainiennes déchirées par la guerre – auquel la Russie participe également – et un accès immédiat à l'aide humanitaire;

8) une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies visant à mettre en place des mécanismes de surveillance internationale pour soutenir l'accord de paix.

Vers une paix positive

Le président John F. Kennedy a observé avec sagesse que «la paix véritable doit être le produit de nombreuses nations, la somme de nombreux actes. Elle doit être dynamique, et non statique, et évoluer pour relever le défi de chaque nouvelle génération. Car la paix est un processus – une voie pour résoudre les problèmes.»

Pour résoudre les problèmes, nous avons besoin de coopération, et pour coopérer, nous avons besoin de confiance. Une paix durable ne dépend donc pas seulement de traités officiels, mais aussi de la coopération au sein des communautés, entre les ethnies, les religions et les Etats-nations. Les médias ont également la responsabilité de faire en sorte que les tambours de la guerre cèdent la place à des paroles de paix.

Les communautés religieuses sont à l'avant-garde de la paix positive. Elles rassemblent les gens dans l'esprit de la dignité humaine et de la justice sous Dieu, et ont la capacité et la mission de rassembler les gens au-delà des croyances et des ethnies. L'Eglise catholique, le Patriarcat œcuménique, le Patriarcat de Moscou et l'Eglise orthodoxe d'Ukraine sont les piliers d'une paix positive entre la Russie et l'Ukraine, ainsi qu’au sein des diverses communautés ukrainiennes, et peuvent jouer un rôle crucial dans le processus de réconciliation nécessaire pour parvenir à une paix positive.

Nous recommandons aux chefs religieux de toutes les confessions de soutenir la Russie et l'Ukraine dans la recherche d'une paix positive, et de respecter les paroles d'Isaïe:

Ils forgeront leurs épées en socs de charrue et leurs lances en serpes. Une nation ne lèvera pas l’épée contre une nation, et ils n’apprendront plus la guerre. (Isaïe 2, 3-4)

Addendum. Autres considérations

Même si les combats continuent de faire rage, ni la Russie ni l'Ukraine ne sont susceptibles d'obtenir un résultat supérieur à une paix négociée. Néanmoins, les conditions décrites ci-dessus ne manqueront pas de susciter les quatre revendications suivantes, auxquelles nous répondons.

1re objection: l'Ukraine a le droit de choisir l’adhésion à l'OTAN

Alors que la Charte de l'OSCE (paragraphe 8) reconnaît le droit des Etats membres de l'OSCE à choisir leurs arrangements de sécurité, y compris les traités d'alliance, les Etats sont également tenus de «ne pas renforcer leur sécurité aux dépens de la sécurité d'autres Etats».

Au lieu de cela, ils se sont engagés à créer un espace de sécurité commun de l'OSCE «exempt de lignes de démarcation et de zones ayant des niveaux de sécurité différents» (paragraphe 1), dans lequel «aucun Etat, groupe d'Etats ou organisation ne peut avoir de responsabilité prééminente dans le maintien de la paix et de la stabilité [...] ou ne peut considérer une partie quelconque de l'espace de l'OSCE comme sa sphère d'influence» (paragraphe 8).

A cette fin, les Etats membres de l'OTAN et la Fédération de Russie se sont engagés, dans l'Acte fondateur OTAN-Russie (1997), à maintenir la retenue stratégique et la stabilité par des engagements de maîtrise des armements et par l'amélioration de la coopération mutuelle en matière de sécurité et le renforcement de l'OSCE en tant qu'organisation de sécurité commune.

En outre, l'OTAN n'est pas obligée d'accepter les demandes d'adhésion d'autres Etats, mais elle doit en évaluer les conséquences pour la stabilité régionale et stratégique et la sécurité mutuelle. Selon la Russie, l'élargissement de l'OTAN à l'Ukraine et à la Géorgie se ferait au détriment de la sécurité de la Russie.

Avec l'élargissement prévu de l'OTAN, les Etats-Unis et leurs alliés pourraient s'emparer de la base stratégique de la flotte russe de la mer Noire en Crimée, créer de nouvelles zones potentielles de stationnement de troupes et de missiles plus près du cœur de la Russie, ce qui porterait atteinte à l'équilibre stratégique, et les forces de l'OTAN seraient en mesure de limiter l'accès de la Russie à la mer Noire et à la Méditerranée orientale pour ses besoins commerciaux et militaires.

Il s'agit là de considérations séculaires, qui étaient en jeu lors de la guerre de Crimée (1853–1856) et le sont à nouveau aujourd'hui. En outre, alors que l'OTAN se décrit comme une alliance purement défensive, les vues de la Russie sont tout autres.

Les dirigeants et les diplomates russes ont exprimé à plusieurs reprises leurs graves préoccupations concernant le bombardement par l'OTAN de la Serbie, partenaire de la Russie, en 1999; la «coalition des volontaires» dirigée par les Etats-Unis dans la guerre contre l'Irak en 2003, malgré les objections du Conseil de sécurité de l’ONU; et la violation des mandats du même Conseil de sécurité dans le bombardement par les alliés de l'OTAN de la Libye, partenaire de la Russie, en 2011, qui a conduit à un changement de régime et à un chaos prolongé.

De l'avis de la Russie, l'OTAN sert les intérêts géopolitiques des Etats-Unis et de leurs alliés bien au-delà de sa raison d'être déclarée, à savoir la défense collective de l'Europe occidentale dans le contexte de la longue guerre froide. Cependant, tout en prenant au sérieux ces préoccupations russes, elles ne justifient en aucun cas une agression militaire contre un Etat voisin souverain.

2e objection: l'Ukraine va bientôt reconquérir les territoires pris par la Russie depuis l'invasion de février

L'Ukraine et ses partisans affirment que l'Ukraine gagnera une guerre d'usure, soulignant les dommages causés à l'économie russe par les sanctions occidentales et les piètres performances de l'armée russe. Pourtant, la Russie s'empare d'une quantité importante de terres, et continue d'accroître les territoires occupés dans le Donbass.

Selon le FMI, le PIB de la Russie en 2021, qui s'élevait à 1,8 billion de dollars, était environ 9 fois supérieur au PIB de l'Ukraine, qui s'élevait à 200 milliards de dollars. Depuis l'invasion, l'économie ukrainienne est dans un état désespéré et menace de s'effondrer complètement, avec un déclin de peut-être 50% du PIB, alors que le déclin économique de la Russie pourrait être d'environ 10%. Selon certains rapports, les recettes d'exportation en dollars de la Russie ont en fait augmenté, et non diminué, parce que les sanctions ont fait augmenter le prix mondial des produits d'exportation russes, alors que les recettes d'exportation de l'Ukraine se sont effondrées.

Les perspectives de l'Ukraine dans une guerre d'usure dépendent donc entièrement du maintien du soutien financier et militaire à grande échelle de l'Occident. Or, le soutien de l'opinion publique aux Etats-Unis et dans l'Union européenne en faveur de nouveaux crédits importants s'amenuise déjà, surtout sous le lourd fardeau de la baisse du niveau de vie résultant des bouleversements économiques de la guerre et des sanctions.

3e objection: la Russie doit être punie, et non récompensée, pour l'invasion

Les différends de la Russie avec l'Ukraine et l'OTAN auraient certainement dû être résolus par des négociations pacifiques. Pourtant, lorsque la Russie a tenté de négocier avec l'administration Biden et l'OTAN en décembre 2021 sur la question de l'élargissement de l'OTAN, les Etats-Unis et l'OTAN ont répondu que la prérogative de l'Ukraine d'adhérer à l'OTAN n'était pas négociable.

Lorsque la Russie a soulevé la question de l'incapacité de l'Ukraine à mettre en œuvre les accords de Minsk, les pays européens garants n'ont apporté aucun soutien. Ces faits ne justifient en aucune façon l'invasion de l'Ukraine par la Russie, mais ils contribuent à les expliquer et, surtout, à indiquer les points de repère qui permettront de mettre fin à la guerre.

La Russie doit également s'abstenir de créer des récits niant l'identité nationale de l'Ukraine et de récupérer volontairement des territoires qu'elle affirme être historiquement russes, car cela conduirait à une guerre prolongée et détruirait toute chance de réconciliation et de paix.

4e objection: la Russie et l'Ukraine sont loin d'un règlement négocié, les combats vont donc se poursuivre

Les raisons de la confiance dans les négociations sont les suivantes. Sur le plan militaire, la guerre s'est installée dans un conflit intense dans une région étroite de l'Ukraine (Donbass et ligne côtière sud, soit 20% du territoire ukrainien). Les gains réalisés sur le terrain par l'une ou l'autre des parties ont un coût élevé.

Les craintes occidentales que la Russie envahisse l'Ukraine et poursuive ensuite sa route vers d'autres pays sont révolues depuis longtemps. D'un autre côté, la croyance selon laquelle les armes de l'OTAN écarteront rapidement la Russie du champ de bataille a également été réfutée.

En outre, les sanctions de l'Occident, autrefois considérées comme le moyen d'écraser l'économie russe, se sont révélées d'une efficacité limitée et d'un coût élevé pour le reste du monde. Les deux parties ont atteint la condition d'«impasse douloureuse», qui est considérée comme une indication primaire de la maturité d’un conflit pour la résolution.

Une négociation réduirait aussi considérablement les risques de déstabilisation des sociétés des pays non voisins, en Europe et sur d'autres continents, pour les conséquences sociales et économiques d'un conflit persistant.

Ni la Russie ni l'Ukraine ne sont susceptibles d'améliorer ces points de référence en poursuivant les combats. La Russie pourrait être en mesure de capturer davantage de territoire ukrainien au prix d'un lourd tribut pour son armée et son économie, mais elle ne serait probablement pas en mesure de convertir l'occupation de ce territoire supplémentaire en un accord de paix plus avantageux.

Au contraire, l'occupation d'encore plus de territoire, ou l'annexion unilatérale du Donbass à la Russie, conduirait presque certainement à un conflit gelé dans lequel le régime de sanctions de l'Occident resterait en place, des centaines de milliards de dollars des réserves de change de la Russie resteraient bloqués, le commerce et les investissements entre la Russie et l'Occident seraient suspendus indéfiniment, et les charges financières de la reconstruction des régions occupées incomberaient entièrement à la Russie.

Il est également peu probable que l'Ukraine améliore ces critères en poursuivant les combats. Les Etats-Unis et les autres pays de l'OTAN ont clairement indiqué les limites du type de soutien militaire et financier qu'ils sont prêts à offrir. L'économie ukrainienne a déjà été ravagée, et la poursuite des combats entraînerait des pertes encore plus graves. L'Ukraine a déjà admis la réalité du non-élargissement de l'OTAN, mais la conclusion d'un accord sur ce point avec la Russie pourrait lui assurer des avantages significatifs si la Russie prend à son tour des mesures appropriées.

Mobiliser une alliance pour la paix

Le plus grand obstacle à une issue négociée est peut-être la peur des négociations elles-mêmes. Les hommes politiques craignent d'être taxés d'apaisement, voire de défaitisme, s'ils appellent à un compromis à la table des négociations plutôt qu'à une victoire militaire pure et simple. C'est pourquoi les artisans de la paix sont si essentiels à ce stade. Le rôle de Sa Sainteté le Pape François et du Secrétaire général des Nations Unies, M. António Guterres, ainsi que d'autres artisans de la paix estimés, pourrait être déterminant à cet égard.

Les partisans de la paix doivent soutenir les hommes politiques qui prennent le risque de chercher à négocier. Ceux qui, comme le Premier ministre Mario Draghi, ont récemment présenté les propositions de paix de l'Italie, méritent nos plus vives félicitations. Nous devons mobiliser les organisations de la société civile et l'opinion publique mondiale en faveur de la paix et appeler à une Alliance pour la paix.

Signataires

Jeffrey D. Sachs, President of the UN Sustainable Development Solutions Network and University Professor at Columbia University

Anthony Annett, Gabelli Fellow at Fordham University

Maria Paola Chiesi, Science and Ethics of Happiness Study Group

Richard Falk, Milbank Professor of International Law and Practice, Emeritus, Princeton University

Ana Marta Gonzalez, Professor of Moral Philosophy at the University of Navarra

Nina Khrushcheva, Professor of International Affairs at The New School

Anatol Lieven, Senior Research Fellow at the Quincy Institute for Responsible Statecraft

Mario Marazziti, Former Deputy and President of Human Rights Committee, Italian Parliament

Miguel Ángel Moratinos, UN High Representative for the Alliance of Civilizations and Former Foreign Minister of Spain

Romano Prodi, Former Prime Minister of Italy and tenth President of the European Commission

Wolfgang Richter, Senior Associate in International Security at the German Institute for International and Security Affairs

Richard E. Rubenstein, University Professor of Conflict Resolution and Public Affairs at George Mason University

Michael von der Schulenburg, Former United Nations Assistant Secretary-General in UN Peace Missions

Anna Sun, Associate Professor of Religious Studies at Duke University

William F. Vendley, Vice President for World Religions and Spirituality at the Fetzer Institute and Secretary-General Emeritus at Religions for Peace

Quelle: https://www.jeffsachs.org/newspaper-articles/lljyk5p69dhcrm8epskjc7zh9d9n42, 23 juin 2022

(Traduction «Point de vue Suisse»)

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