Entretiens de Genève

Une obligation pour tous de bien réfléchir à l'avenir que nous voulons avoir en Allemagne, en Europe et dans le monde

par Willy Wimmer*

(19 janvier 2022) Réd. En quelques mots, Willy Wimmer décrit en début d'année, avec grande lucidité, la faiblesse de l'Europe et l'arbitraire des Etats-Unis envers la Russie, mais aussi envers l'Europe.

Cette première semaine de travail de la nouvelle année a été marquante. Notre destin est sur la table à Genève, Bruxelles et Vienne, lorsque les représentants de la Russie et des Etats-Unis, de la Russie et des pays membres de l'OTAN ainsi que de la Russie et des autres Etats membres de l'OSCE se rencontrent. Il n'y aura apparemment pas de solutions rapides, mais une obligation pour tous de bien réfléchir à l'avenir que nous voulons avoir en Allemagne et en Europe.

Remarques sur la situation actuelle en Europe:

Lors du sommet de l'OTAN de 2008 à Bucarest, l'Allemagne et la France ont clairement fait savoir qu'elles ne voulaient pas que l'Ukraine ou la Géorgie rejoignent l'OTAN. La décision de la conférence était la forme diplomatique du refus. Les Etats-Unis voient les choses différemment. Ils veulent, contre la volonté des Etats européens, maintenir la voie ouverte à l'adhésion de l'Ukraine et de la Géorgie pour défendre leurs intérêts stratégiques et contre la volonté des Etats européens.

En 2015, après le coup d'Etat en Ukraine, l'Allemagne et la France ont imposé à l’Ukraine, dans l'Accord de Minsk conclu avec la Russie et l'Ukraine, l'obligation d'accorder un statut d'autonomie particulier aux régions de l'est de l'Ukraine.

L'Ukraine contourne cet engagement et refuse de mettre en œuvre cette autonomie. Les Etats-Unis les soutiennent dans cette démarche en leur fournissant des armes.

La politique des Etats-Unis au sein de l'OTAN, qui vise à obliger les Etats membres de l'OTAN à respecter les objectifs globaux des Etats-Unis, en violation du traité, a des conséquences extrêmement négatives sur la validité juridique de la politique de l'OTAN depuis la décision sur le concept stratégique de l'OTAN prise en avril 1999 à Washington. Cette décision constitue une violation du traité de l'OTAN.

Les Etats-Unis ont pour objectif déclaré de pousser la Russie hors de l'Europe. Ils détruisent ainsi l'esprit et le contenu de la Charte de Paris de novembre 1990. Celle-ci avait ouvert la voie à la coopération entre les Etats signataires, en incluant les Etats-Unis et l'Union soviétique. La maison commune européenne devait être l'objectif.

Les entretiens exploratoires qui ont lieu ces jours-ci à Genève entre les Etats-Unis et la Russie montrent clairement à quel point nous sommes loin de la Charte de Paris et à quel point nous sommes proches d'une ligne de fracture définitive et d'une possible guerre en Europe.

Les événements au Kazakhstan, qui accompagnent les entretiens de Genève, montrent clairement les conséquences pour nous tous de la mise en œuvre d'une politique «sur le fil du rasoir». Le secrétaire d'Etat américain Antony Blinken a souligné ces jours-ci la manière dont les Etats doivent traiter les autres Etats pour préserver la paix. Le monde se porterait mieux si les Etats-Unis avaient respecté cette règle au cours des décennies qui ont suivi la Charte de Paris.

* Willy Wimmer est juriste et une personnalité politique allemande. De 1976 à 2009, il a été membre du Bundestag. En 1985 et en 1992, il a été porte-parole de la CDU/CSU et par la suite secrétaire d’Etat parlementaire auprès du ministre fédéral de la Défense. De 1994 à 2000, il fut vice-président de l’Assemblée parlementaire de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE). Willy Wimmer prend régulièrement position de manière indépendante et résolue sur les questions de l’Allemagne et de la politique internationale. Il publie régulièrement des articles et des livres

Source: https://seniora.org/politik-wirtschaft/gespraeche-in-genf, 10 janvier 2022
Réimpression avec l'aimable autorisation de «seniora.org».

(Traduction «Point de vue Suisse»)